Par Anne-Sophie Lapointe, Virginie Bros-Facer, le 9 mars 2017

Recommandations internationales pour répondre aux besoins des patients atteints de maladies rares non diagnostiquées

La question du diagnostic, de l’errance ou « odyssey »,  a été toujours une question fondamentale pour les associations de malades. Elles se sont emparées, dès leurs créations, de ce sujet devant le désarroi important qu’ont pu rencontrer leurs membres face à une longue attente de diagnostic. Ce retard ou cette absence de diagnostic peut avoir des conséquences sur la relation de confiance entre le patient et son médecin et au-delà être un frein pour la recherche. L’enquête « Erradiag » de l’Alliance Maladies Rares et l’Observatoire de Maladies Rares Info Services ont permis de souligner notamment que ces délais retardent l’accès au conseil génétique et qu’un grand nombre de malades souhaitent échanger sur leurs problématiques entre pairs.

Cette question de l’errance de diagnostic est liée également à la question du « sans diagnostic ». La génétique et le génome continuent à nous renseigner chaque jour sur de nouvelles maladies, très souvent « ultra-rares » ou « unique ». L’arrivée du séquençage de l’exome et du génome catalyse cette recherche et ces découvertes. Dans l’analyse des données liées aux maladies des anomalies du développement, la BNDMR (Banque Nationale de Données Maladies Rares) a permis de montrer que 50% de la file active suivie par la filière de santé maladies rares AnDDI-Rares étaient sans diagnostic, près de 100 000 personnes sont ainsi concernées.

La filière AnDDI-Rares avec le Pr. Laurence Faivre a ainsi pu participer à la révision de recommandations internationales pour répondre aux besoins spécifiques que rencontrent les patients atteints de maladies rares non diagnostiquées. L’élaboration de ces recommandations est une initiative qui dépasse largement les frontières de l’Europe. L’Australie, L’Amérique du Nord et le Japon, l’association sans diagnostic SWAN UK, la Wilhelm Foundation, Eurordis (Fédération européenne des maladies rares » et le réseau des associations sans diagnostic Europe, SWAN Europe, dont fait partie l’association française des « sans diagnostic » ou diagnostic ultra-rares (ASDU, Association sans Diagnostic et Unique) ont échangé et se sont rencontrés pour porter ainsi 5 recommandations.

Quelles sont ces recommandations internationales qui répondent aux besoins des malades et de leur entourage ?

  1. Les personnes sans diagnostic sont touchées par les conséquences de la rareté de leur maladies : absence d’information, difficultés d’accompagnement, besoins non couverts. Face à des difficultés importantes, il est recommandé que les politiques nationales maladies rares intègrent une prise en charge médicale et sociale spécifique pour les personnes sans diagnostic. Trop souvent l’absence de diagnostic a pour conséquence une absence de reconnaissance et d’accès à des compensations sociales, à l’éducation et à l’emploi. Des politiques nationales pour les sans diagnostic nécessitent une coordination, une communication et un partage d’information entre tous les acteurs.
  2. Chaque pays doit pouvoir porter des politiques volontaristes en matière de diagnostic. La France s’est ainsi dotée d’un plan médecine génomique 2025. Durant une année, tous les acteurs (représentants institutionnels, agences de recherche et sanitaire, médecins, chercheurs, associations et industriels) ont pu être impliqués de façon transversale afin que soit examinée, sur les dix prochaines années, la mise en place des conditions d’accès au diagnostic génétique en France.
  3. L’articulation dans le partage des connaissances entre les pays et au sein des pays est fondamentale. En France, le filière de santé AnDDI-Rares, porte activement cette problématique en formalisant notamment un partenariat avec l’Association ASDU et Maladies Rares Info Services. Les remontées issues des patients quant à leur maladie permettent de mieux comprendre la clinique avec le diagnostic génétique et ce savoir doit être partagé.
  4. Les programmes de recherche sur les questions liées aux nouvelles technologies doivent impliquer les associations. Les Sciences Humaines et Sociales (SHS) abordent des champs non encore couverts par l’arrivée du séquençage haut débit. Le projet Sequapre, porté par le Pr. Laurence Faivre et financé par la Fondation maladies rares, a ainsi pour objectif  de mieux comprendre les préférences et ce qu’elles représentent pour les malades et leurs familles par rapport à l’arrivée de ces nouvelles technologies de diagnostic. L’Alliance Maladies Rares est partenaire dès l’origine de ce programme de recherche.
  5. L’utilisation des nouvelles technologies s’accompagne de collaborations accrues sur le plan international en favorisant un partage important des données issues de l’analyse de l’exome ou du génome de la personne en recherche de diagnostic. La mise en place de l’ERN ITHACA (Rare Malformations, Developmental Anomalies & Rare Intellectual disabilities) favorisera de grands progrès dans la recherche des patients sans diagnostic en créant un éco-système favorable entre les partenaires impliqués dans ce réseau.

Ces recommandations garantissent ainsi un cadre favorable de bonnes pratiques aux personnes en absence de diagnostic. Les questions éthiques sont un enjeu important du développement de ces nouvelles technologies et assurent que les progrès de la médecine génomique mettent en permanence le malade et sa famille au centre des préoccupations de tous les acteurs mobilisés (associations, médecins, chercheurs, politiques).

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